Ce sont les propos de Robert REGARD Vice-président du Conseil National de l’Ordre des Chirurgiens Dentistes
“Il y a environ une dizaine d’années, nous avons dû faire face à une demande de soins bucco-dentaires de plus en plus pressante venue de personnes habitant des villages et hameaux éloignés de tout cabinet dentaire dans une zone géographique rurale englobant des territoires situés en Saône-et-Loire, dans la Nièvre et en Côte d’Or.
La plupart de ces villages ou hameaux comptaient auparavant des cabinets, tous disparus aujourd’hui, qui permettaient à la population locale de recevoir des soins de proximité. Cette région en voie de désertification avait également vu disparaître pratiquement tous les moyens de transport collectifs existant. A cela s’ajoutait le vieillissement de la population composée de plus en plus de retraités. Or beaucoup d’entre eux ne possédaient pas de moyen de locomotion personnel ou n’étaient plus aptes à conduire.
La conjonction de tous ces éléments a fait qu’une population relativement importante ne pouvait plus accéder à des soins bucco-dentaires de qualité et de proximité. De plus, un grand nombre de ces personnes bénéficiaient des services d’une association d’aide de soins à domicile bien que toutes ces personnes n’étaient pas dépendantes physiquement. Nous avons donc organisé une réunion entre les responsables de cette association et les chirurgiens-dentistes de l’Autunois. Cette rencontre a permis la mise en place d’un service de soins dentaires à domicile réservé aux adhérents de l’association, puis à un public plus large. Une liste de praticiens volontaires a été dressée et, à ma grande satisfaction, au cours des deux premières années de fonctionnement, tous les chirurgiens-dentistes de cette région étaient volontaires. Les patients pouvaient choisir sur cette liste le praticien qui leur convenait. Si celui-ci n’était pas disponible, ils pouvaient reporter leur choix sur un autre praticien sachant que les professionnels s’étaient engagés à répondre aux demandes de soins dans les meilleurs délais possibles. Un matériel portable avait été mis à disposition des chirurgiens-dentistes qui ne disposaient pas d’un tel équipement. Ce service a bien fonctionné pendant quelques années. puis, des problèmes sont apparus. La demande de plus en plus forte et pas toujours justifiée a fait que certains confrères qui ne pouvaient pas y faire face se sont retirés de la liste des volontaires. Le temps perdu en déplacement et la faible rentabilité économique de cet engagement en ont découragé d’autres. Il s’est également très vite avéré que les matériels dont nous disposions, associé à des conditions de confort d’exercice parfois très précaires, ne permettait pas d’exécuter certains soins ou nuisait à leur qualité. Ce service a aujourd’hui pratiquement disparu : et, seuls deux ou trois praticiens continuent de rendre service à une population défavorisée.
Cependant, compte tenu de la demande de plus en plus forte, il nous faut mettre en place un système de dispensation des soins bucco-dentaires de proximité ou à domicile plus adapté aux réalités du terrain et garantissant à tous des soins de qualité. Nous pouvons envisager plusieurs types de solution.
· ·Premièrement, nous pouvons envisager de créer des unités de soins dentaires mobiles. Un camion pourrait donc être équipé d’un plateau technique de haute qualité.
· Deuxièmement, nous pouvons concevoir la création de maisons de soins pluridisciplinaires comprenant un cabinet dentaire ou pouvant accueillir une unité mobile. En effet, il est possible d’envisager qu’une unité mobile puisse se rendre dans plusieurs maisons de soins mais également au domicile de certains patients.
· ·Troisièmement, nous pouvons envisager le transport des patients vers les maisons de soins. Service qui peut être organisé et pris en charge par le Conseil Général
D’autres combinaisons peuvent être trouvées à partir de ces supports. Il faut aussi mettre en place ou bénéficier d’une structure administrative qui peut être celle d’une maison de soins ou celle d’une association. Nous devons former un personnel adapté à ce type d’exercice. Nous devons également définir à qui appartiendront ces maisons de soins ou ces unités mobiles et réfléchir à leur mode de financement. Nous pouvons également imaginer que plusieurs praticiens exerceront dans ces structures qu’elles soient fixes ou mobiles ou éventuellement qu’un praticien exercera, par exemple, dans plusieurs maisons de soins. Cependant, il n’y aura pas de solution sans une augmentation du numerus clausus, sans une prise en charge financière responsable et sans des incitations visant à encourager les praticiens à exercer dans ces zones en voie de désertification.
Philippe LEFAIT (animateur du débat)
Quand pourrez-vous disposer d’un tel camion mobile ?
Robert REGARD
Nous ne disposons pas à ce jour d’une unité mobile en province. Je sais que cette solution peut fonctionner d’autant que j’ai travaillé, il y a 40 ans, au Maroc où je dispensais des soins dans un semi-remorque parfaitement équipé. Cette solution est techniquement réalisable. Il suffit simplement de former le personnel et de trouver le mode de fonctionnement adapté. ”
RAPPEL :