Le glutathion – un antioxydant – pourrait jouer un rôle majeur de défense vis-à-vis des inflammations épithéliales chroniques. C’est ce que concluent des chercheurs britanniques qui ont mesuré les taux de cette substance chez des sujets porteurs de parodontopathies destructives. Ce résultat va dans le même sens que des études précédentes qui avaient montré le rôle du glutathion dans certaines maladies pulmonaires chroniques.
De 10 à 15 % de la population mondiale serait atteinte de parodontites chroniques destructives. Cette pathologie, qui atteint préférentiellement des sujets prédisposés génétiquement, est à l’origine des pertes dentaires par déchaussement. Cliniquement, ces malades présentent une réponse inflammatoire et immunitaire exagérée à la plaque dentaire qui s’accumule à la lisère gingivale.
Chez les sujets sains, les cellules de l’inflammation présentes en plus grand nombre sont les leucocytes polynucléaires. Dans les formes chroniques et très inflammatoires de parodontopathies, ces cellules sont activées de façon exagérée et, de ce fait, elles produisent une quantité majorée de radicaux libres. Or ces molécules donneuses d’oxygène ont la particularité d’induire une destruction du tissus péri-odontal et de majorer la résorption ostéoclastique osseuse. « Mais, à eux seuls, les radicaux libres ne peuvent pas expliquer tous les phénomènes qui se produisent chez les patients porteurs de parodontites chroniques. Il semblerait qu’un ensemble de facteurs se surajoutent pour induire les lésions cliniques. Parmi ceux-ci, on distingue, d’une part, une composante infectieuse et, d’autre part, un aspect inflammatoire par diminution de la captation des radicaux libres par certaines cellules, telles que les leucocytes et les fibroblastes », explique le Dr I. Chapple (Birmingham, Grande-Bretagne).
Ce dernier mécanisme a été bien étudié chez les personnes souffrant d’affections pulmonaires inflammatoires chroniques (grands fumeurs, sujets atteints de fibrose pulmonaire, etc.) au cours desquelles il existe aussi, de façon conjointe, une baisse des concentrations, de glutathion extracellulaire, un antioxydant.
Le liquide du sulcus gingival
L’équipe de médecins britanniques a recueilli chez 10 sujets souffrant de parodontopathies chroniques du liquide du sulcus gingival – espace virtuel situé entre la gencive et les dents – ainsi que chez des sujets contrôles appariés pour l’âge et le sexe. Les leucocytes ont été extraits du liquide et ils ont été mis en contact avec des cellules gingivales épithéliales au sein d’un milieu contenant du F-Met-Leu-Phe cytochalasine B (un stimulant des fonctions leucocytaires). Dans un second temps, les capacités anti-oxydantes de l’ensemble de ces cellules ont été étudiées par chimiluminescence. Enfin, par chromatographie gazeuse, les investigateurs ont précisé les taux de glutathion réduit et oxydé au niveau du liquide.
Chez les porteurs de parodontopathie chronique, les taux sanguins et liquidiens d’anti-oxydants étaient diminués par rapport aux sujets contrôles. Pour les auteurs, « on ne peut conclure de façon formelle à une responsabilité directe de la baisse des capacités anti-oxydantes sur la pathologie, car il reste impossible d’exclure qu’elle soit directement en rapport avec une hyperréactivité des neutrophiles et/ou le reflet d’une atteinte inflammatoire des tissus périodontaux en rapport avec une majoration locale de la production de radicaux libres ».
Capacités anti-oxydantes
L’analyse des taux de glutathion a montré une baisse conjointe du glutathion oxydé et réduit. Par analogie avec les pathologies pulmonaires chroniques dans lesquelles les capacités anti-oxydantes des liquides extracellulaires sont abaissées, les auteurs concluent que « le glutathion pourrait jouer un rôle essentiel de défense (de par ses capacités anti-oxydantes et anti-inflammatoires) au sein des épithéliums de surface ». Des études devraient maintenant être mises en place afin de mieux comprendre l’origine de cette substance, sa fonction et son système de régulation. Ces travaux pourraient se traduire par le recours à cette substance chez les porteurs de maladies inflammatoires chroniques épithéliales gingivales ou pulmonaires.
Dr Isabelle CATALA “Le quotidien du médecin”
« J Clin Pathol Mol Pathol », 2002 ; 55 : 367-373.