L’ANSM veut restreindre l’accès des médicaments à base de codeïne

Nathalie Richard, directrice à l’agence du médicament (ANSM), dénonce un phénomène de plus en plus courant, et annonce réfléchir à une façon d’encadrer la vente du médicament.

Le phénomène prend de l’ampleur selon Nathalie Richard, directrice adjointe des médicaments de la douleur et du système nerveux central à l’ANSM, le gendarme du médicament.

La prise de codéine et de paracétamol, à but récréatif, est-elle nouvelle ?

Nathalie Richard. Cet usage se répand de plus en plus chez les préadolescents, ce qui est préoccupant. Plus que l’effet planant de la codéine, le paracétamol, à dose élevée, peut être très toxique et endommager le foie.

Ce phénomène semble s’accentuer depuis un an.

La prise de cette substance chez cette tranche d’âge, qu’elle soit en solution buvable ou en comprimés, nous inquiète. En mars 2016, on avait déjà fait un signalement sur le «purple drank», ce cocktail à base de sirop pour la toux, détourné pour se droguer. Cette tendance persiste. Depuis le début de l’année, sur les cinq cas graves d’intoxications déclaré à la codéine, deux jeunes sont décédés.

Y a-t-il un profil type ?

Dans la plupart des cas, il s’agit de préadolescents et de jeunes majeurs sans histoire, sensibles au phénomène de mode. Les réseaux sociaux jouent un rôle majeur : des recettes circulent sur Internet. On est bien loin de l’image classique du toxicomane.

La vente de médicaments à la codéine, sans ordonnance, a-t-elle augmenté ?
Les chiffres sont stables. 22 millions de boîtes ont été vendues en France en 2015, ceux de 2016 sont en cours d’analyse. Mais ces données ne peuvent servir d’indicateurs précis. Des pharmaciens et des médecins font des signalements. On fait aussi des enquêtes auprès des officines. C’est à partir de ce faisceau de preuves que l’on travaille.

Pensez-vous interdire le libre accès à ces produits ?
On doit trouver un équilibre entre, d’un côté, restreindre leur accès aux jeunes et de l’autre, ne pas se priver de traitements efficaces contre la douleur. Il ne faut pas pénaliser les malades. On réfléchit à la manière dont on peut mettre en place des mesures et mieux encadrer l’achat de médicaments codéinés chez cette population vulnérable. Les pharmaciens ne sont pas obligés de vendre un produit s’ils ont des doutes. On souhaite aussi faire davantage de prévention auprès d’eux, ce sont des acteurs de première ligne. Et on informera aussi le corps professoral. Il faut trouver une solution.

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