Mise au point sur le fluor et la prévention de la carie dentaire

La carie dentaire, classée troisième fléau mondial par l’OMS est une maladie encore largement répandue en Europe.

Depuis 1970, une diminution significative de la carie a été observée dans la plupart des pays industrialisés. Cette diminution est multifactorielle (changement des habitudes alimentaires, brossage régulier des dents, utilisation de fluorures) mais c’est vraisemblablement l’utilisation des fluorures sous diverses formes (comprimés, eau, sel de table, dentifrices) qui a joué un rôle déterminant dans l’amélioration de l’état dentaire des enfants.
Cependant, depuis quelques années, la supplémentation fluorée est remise en question. Certaines publications, se référant aux nouvelles recommandations en vigueur aux Etats-Unis et au Canada mettent en garde les praticiens français à l’égard du risque de fluorose et préconisent de ne suplémenter qu’à partir de l’âge de 6 mois.

L’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé a réévalué l’intérêt de la prescription fluorée dans la prévention de la carie chez le nourrisson et chez la femme enceinte, et proposé des recommandations de bon usage de la prescription fluorée.

Les sources d’apport en fluor

-Le sel fluoré Le sel fluoréIl représente le plus gros apport alimentaire de fluor.

Il contient 250 mg/kg de fluorures sous forme de fluorures de potassium. Sur l’étiquetage de ce sel figure la mention ” sel fluoré “.Le sel fluoré est autorisé dans les cantines scolaires depuis 1993, mais n’est pas autorisé en France dans les préparations industrielles.

Avant l’âge de deux ans, l’enfant consomme très peu de sel. Après deux ans, on évalue à environ 0.25 mg/j la dose moyenne de fluor absorbée par l’intermédiaire de sel fluoré lors des repas.Les eaux de distribution

– Les eaux de distribution
La teneur maximale autorisée dans les eaux de distribution, fixée par une directive de la CEE est de 1.5 mg/l.

85 % de la population française vit dans des communes où la teneur en fluor de l’eau de distribution est inférieure ou égale à 0,30 mg/l. Seulement 3 % des français dispose d’une eau de distribution dont la teneur en fluor est supérieure ou égale à 0,7 mg/l (répartis dans quelques communes de 8 départements : 02, 33, 37, 41, 47, 59, 77, 86). En cas de doute, il est possible de vérifier le taux local de fluor sur les brochures d’information accompagnant la facture d’eau, ou de se renseigner auprès de la mairie ou de la DDASS.

-Les eaux minérales naturelles embouteillées Les eaux minérales naturelles embouteilléesLes eaux minérales embouteillées contiennent des quantités variables de fluor, allant de moins de 0.1 mg à 9 mg/l. Le risque de fluorose existe par la seule consommation de certaines eaux minérales à taux de fluor élevé. L’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments a fixé une valeur limite en fluor dans les eaux minérales embouteillées en dessous de laquelle les nourrissons et les enfants peuvent consommer de l’eau minérale sans risque d’apparition de fluorose. Cette limite est fixée à 0,5 mg/l lorsqu’il n’y a pas de supplémentation médicamenteuse fluorée, et à 0,3 mg/l s’il y a supplémentation médicamenteuse. Sur l’étiquetage de ces eaux minérales figurent la mention : ” convient pour la préparation des aliments des nourrissons ”

-Les médicaments
Les médicaments sous forme de comprimés, gouttes, dentifrices , gels et vernis fluorés.Point sur la fluorose dentaire

Définition

La fluorose est due à un surdosage en fluor pendant plusieurs mois ou années (supérieur à 1.5 mg/jour chez l’enfant et supérieur à 0.1 mg/kg chez le nourrisson) survenant lors de la période de minéralisation des dents, qui débute dès le troisième mois de vie in utero et se termine vers 12 ans environ. Elle se caractérise par un aspect tacheté de l’émail dentaire.

Souvent, à tort, les comprimés et les gouttes fluorées ont été désignés comme responsable de la fluorose. En réalité, un nourrisson ne risque pas de fluorose s’il n’a pas d’autre apport de fluor que l’administration médicamenteuse conseillée.

L’accumulation et la méconnaissance des sources d’apport de fluor sont à l’origine de la plupart des cas de fluorose dentaire.Contexte ContexteSuite à l’augmentation de la prévalence des formes légères de fluorose au Canada et aux Etats-Unis, certaines publications préconisent de ne supplémenter qu’à partir de l’âge de 6 mois , voire même 3 ans. Aux Etats-Unis et au Canada, les cas de fluorose s’expliquent par le contexte de surcharge d’apports fluorés. Ainsi, 53 % de la population américaine vit dans des régions où la teneur en fluor dans l’eau de distribution est supérieure à 0.7 mg/l, ce qui entraîne une augmentation de la teneur en fluor des aliments et des boissons.En France, la situation est différente : 85% de la population vit dans des zones où la teneur en fluor est inférieure ou égale à 0.3 mg/l. Par ailleurs, le taux de fluorose dentaire est faible et stable depuis 10 ans (2.75%). Seules des fluoroses légères ou très légères sans préjudice esthétique ou fonctionnel ont été rapportées.

-Prescription
Les publications qui préconisent de ne prescrire du fluor qu’à partir de l’âge de 6 mois (date estimée de la première éruption dentaire) argumentent que l’action du fluor serait essentiellement topique.Or, l’action systémique des fluorures intervient pendant toute la phase de minéralisation des couronnes, c’est à dire dès la naissance pour la première molaire permanente et dès le 5-6 ème mois pour les incisives. L’action topique des fluorures n’est que complémentaire de l’action systémique et agit seulement après l’éruption dentaire sur les processus de reminéralisation de surface et sur l’activité bactérienne de la plaque.Ne prescrire du fluor qu’à partir de l’âge de 6 mois ne protégera pas du risque d’apparition de fluorose car la minéralisation des incisives supérieures permanentes débute aux alentours de 6 mois. De plus, la première molaire permanente (dent la plus fréquemment atteinte par la carie) serait privée de l’action bénéfique du fluor.La carie est toujours un problème de santé publique ; en revanche le risque de fluorose dentaire est La carie est toujours un problème de santé publique ; en revanche le risque de fluorose dentaire estfaible et peut être facilement prévenu par un meilleur contrôle des apports en fluor. faible et peut être facilement prévenu par un meilleur contrôle des apports en fluor.

-Recommandations
Dans les régions où l’eau de distribution contient Dans les régions où l’eau de distribution contient plus de 0,3 mg/l de fluor, plus de 0,3 mg/l de fluor, les comprimés ou gout les comprimés ou gout–tes fluorées ne doivent pas être prescrits. tes fluorées ne doivent pas être prescrits.Dans les autres régions (ce qui représente 85% de la population française), la supplémentation fluorée doit être maintenue dés la naissance et jusqu’à l’âge de 12 ans environ, car l’action systémique des fluorures intervient pendant toute la période de minéralisation des dents temporaires et définitives.Cependant, la maîtrise des apports fluorés est indispensable car la multiplication des sources potentielles de fluor (eaux de distribution et minérales, sel fluoré, médicaments) peut conduire à des surdosages.Afin d’éviter les cumuls, les praticiens doivent établir un bilan personnalisé des apports journaliers en fluor (cf. supra sources d’apport) avant toute prescription médicamenteuse de fluor.La supplémentation fluorée ne dispense pas d’une bonne hygiène bucco-dentaire et alimentaire : limitation des sucres, tout particulièrement sous forme de grignotages et de boissons sucrées entre les repas, éducation précoce au brossage des dents après chaque repas avec un dentifrice fluoré adapté à l’âge, consultation régulière chez le chirurgien-dentiste.Dans les régions où l’eau de distribution contient Dans les régions où l’eau de distribution contient moins de 0,3 mg/l de fluor, moins de 0,3 mg/l de fluor, la dose prophylac la dose prophylac–tique optimale est de 0.05 mg de fluor/kg/jour sans dépasser 1 mg/j, tous apports fluorés confondus. tique optimale est de 0.05 mg de fluor/kg/jour sans dépasser 1 mg/j, tous apports fluorés confondus.

-Chez le nourrisson de 0 à 2 ans :
En l’absence d’autres sources d’apport en fluor représentées par les eaux de boisson ou de préparation des biberons, la prescription de fluor sous forme de gouttes ou de comprimés est systématique. Pour la préparation des biberons, il faut utiliser de l’eau non fluorée ou à très faible teneur en fluor (inférieure ou égale à 0.3 mg/l).

-Chez l’enfant de 2 à 6 ans :
La prescription médicamenteuse doit être adaptée aux autres sources d’apport en fluor (eau embouteillée, sel de cuisine fluoré et dentifrice fluoré) de manière à ne pas dépasser la dose recommandée. Les enfants de moins de 6 ans doivent utiliser des dentifrices dont la teneur en fluor est inférieure ou égale à 500 ppm/100g (50 mg/100g). La quantité de dentifrice à utiliser doit être de la grosseur d’un pois et les enfants doivent bien se rincer la bouche et recracher le dentifrice.

-Chez l’enfant de 6 à 12 ans :
Le fluor est éventuellement apporté par l’eau fluorée et par le sel fluoré.
les enfants de plus de 6 ans peuvent utiliser des dentifrices dosés à partir de1000 -1500 ppm de fluor/100g (100 à 150 mg de fluor /100g).Après 12 ans :
La minéralisation des dents étant terminée, seule l’utilisation de dentifrices fluorés est recommandée.

-Chez la femme enceinte
Un certain nombre d’études épidémiologiques ont été entreprises afin d’évaluer l’efficacité d’une fluoration prénatale. Mais à l’heure actuelle, aucune étude n’a montré une efficacité statistiquement significative de la prévention de la carie sur les dents de lait avec une supplémentation pré et post-natale, comparée à une supplémentation post-natale seule.

source : Agence Française de Sécurité sanitaire des produits de santé 31 juillet 2002