Le réseau “santé bucco-dentaire et handicap”, encore informel, mis en place depuis 1997, s’appuie en grande partie sur l’expérience tirée de ce centre et de ses structures pour fonctionner. Son objectif est de faciliter l’accès aux soins et d’améliorer la santé orale des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes en s’appuyant sur des structures adaptées qui feront le lien entre ces patients et les chirurgiens dentistes libéraux.
L’objectif du réseau est de parvenir à couvrir en 10 ans les besoins de plus de 40.000 personnes en Rhône-Alpes, soit 40% des besoins des personnes handicapées et 30% de ceux des personnes âgées dépendantes hébergées en établissement médico-social.
Le réseau se propose de mettre en place des structures et des formations adaptées au handicap, de faciliter la coordination des soins, et d’encourager le développement des techniques de sédation par inhalation (protoxyde d’azote) et par voie intraveineuse.
“Nous avons constaté les besoins des institutions en accueillant les patients et ce service a rempli tous les rôles qui seront confiés ensuite aux différentes structures du réseau”, explique à APM Santé son chef de service Eric-Nicolas Bory.
Pour Eric-Nicolas Bory, l’emplacement du service est “idéal” car en sus de son emplacement dans un établissement psychiatrique dans lequel est également implanté un institut de recherche en sciences cognitives de l’INSERM, plusieurs hôpitaux -notamment en cardiologie et en neurologie- jouxtent le Vinatier, ce qui favorise la coordination et la multi-disciplinarité prônée par le réseau.
Le service d’odontologie a pris en charge quelque 4000 patients depuis 1997, souligne-t-il. Les patients reçus viennent notamment du Vinatier, d’autres centres hospitaliers spécialisés de la région et d’établissements pour personnes handicapées ou fortement dépendantes.
Le centre permet une prise en charge adaptée et le recours aux différentes techniques notamment les anesthésies sous sédation consciente.
UN SERVICE ENTIÈREMENT REFAIT EN 1999
Les locaux, entièrement refaits en 1999, dégagent de facto une impression de calme et d’harmonie. Cette impression est confortée par les tons bleu, jaune et rouge qui ornent quasiment toutes les pièces du service. Ces couleurs ont été choisies d’après une affiche peinte par des personnes handicapées.
“On indique aux patients les services par la couleur des portes, explique Eric-Nicolas Bory. Celles des soins sont en vert, celles des infirmiers en jaune pâle et les secrétaires en bleu. Les portes où les patients ne doivent pas rentrer sont de la même couleur que les murs”.
En 1996, le directeur de l’hôpital de l’époque, Jean-Paul Segade, nomme Eric-Nicolas Bory chef du service d’odontologie et lui indique que le service doit soit se transformer en un centre de référence, soit fermer. “L’ancien directeur du Vinatier m’a beaucoup encouragé, c’est lui qui m’a demandé de donner une dimension régionale au service” indique-t-il.
Depuis sa nomination, Eric-Nicolas Bory s’est donc employé à renforcer le service. Des moyens supplémentaires ont été affectés au service qui a pu prendre en charge des patients de plus en plus lourds, présentant pour certains des troubles sévères du comportement ou de jeunes patients ne comprenant pas les techniques nouvelles de soins. Chaque consultation dure entre 1h15 et 3 heures.
Des partenariats ont été tissés avec plusieurs établissements médicaux-sociaux, des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) de la région et 6 conventions ont été signées.
Les praticiens se rendent dans un premier temps à l’institution où se trouve le patient. “Un premier ‘état des lieux’ est fait dans l’établissement, à travers un examen clinique assez sommaire”, explique Fatsah Houachine, praticien hospitalier à temps plein depuis septembre 2002.
“Si cela est nécessaire, on fixe un rendez-vous pour un examen plus approfondi, et on établit un projet de soins qui est toujours soumis au consentement du patient ou de la personne responsable”, ajoute-t-il.
Les praticiens libéraux utilisent le réseau depuis un an ou deux en adressant une partie de leurs patients sur le centre quand ceux-ci présentent un handicap trop lourd pour être soigné en cabinet. Mais une des finalités du réseau est de permettre aussi la prise en charge en charge des patients par des praticiens dans d’autres structures qu’au centre.
UNE RELATION DE CONFIANCE À TISSER
“Lors d’une première visite, on évite en général de faire des soins, on a besoin d’établir une relation de confiance, ce qui ne se fait pas forcément tout de suite”, indique le Dr Bory
Des exceptions existent, surtout si le patient vient de loin pour se faire soigner. “Une jeune fille de 20 ans de Valence, souffrant de troubles du comportement nous a été récemment adressée, elle est venue avec un éducateur, le chirurgien dentiste de la région de Valence n’était pas arrivé à la prendre en charge. On a dû la soigner dès la première visite car elle avait fait beaucoup d’heures de route. On a vu qu’elle avait une carie profonde, on l’a soignée sous sédation consciente”.
“Tout ne se passe pas toujours aussi bien, tempère-t-il toutefois, la famille peut parfois demander trop de soins en une seule fois, et, au bout d’un moment, le patient ne les accepte plus”.
La plupart des patients qui arrivent au centre sont déjà sous prémédication afin de faciliter les soins dentaires, explique Corinne Artes, aide-soignante au centre depuis 2 ans. Un gel anesthésiant est souvent appliqué après cette prémédication.
Les temps changent. “Auparavant, les patients étaient souvent été hospitalisés un mois, voire plusieurs mois pour rien”, s’exclame-t-il. Il relève en particulier le cas d’un patient trisomique et autiste qui présentait des infections à répétition, en médecine interne pendant trois mois avant d’arriver en odontologie.
Ce patient avait des dents dans un état “lamentable” et présentait une halitose (odeur nauséabonde repérable à plusieurs mètres). Finalement, une sinusite a été notamment diagnostiquée, due à la présence d’un staphylocoque résistant au niveau du sinus et des poches parodontales (tissus de soutien des dents).
Lundi 13 septembre 2004 – Copyright © APM-Santé