D’autre part, elle passait par le rétrécissement du champ visuel, également par des paliers de la puissance 103, à partir de la surface du corps humain jusqu’aux structures de l’ADN, puis des atomes et finalement des quarks, qui sont les plus petites particules élémentaires connues à ce jour. Il s’avère qu’il y a à ces deux extrêmes une étonnante similitude des structures fondamentales, puisqu’elles se dessinent sous forme d’éléments sphériques entourés de vide. Et le conférencier d’assimiler ces structures « symétriques » à des archétypes dans le sens de la psychanalyse de C.G. Jung. Plus près du sujet principal de sa conférence, le spécialiste a ensuite livré quelques réflexions personnelles à propos du symbolisme des dents sur le plan psychique de l’être humain. « Avoir du mordant » ou « croquer la vie à pleines dents » figurent parmi les expressions courantes qui reflètent la « puissance » ou la « vitalité ». Au plan métaphorique, la perte des dents est habituellement associée à la perte de l’énergie vitale au cours des processus de vieillissement, voire à la « castration ». Et l’édentation disgracieuse fait inévitablement surgir en nous l’image de la vilaine sorcière des contes de fées … Plus loin dans ces considérations, le bruxisme peut être interprété comme étant une réaction de frustration causée par l’incapacité de « mâcher », donc de « digérer », ses propres émotions. Or, les dents ne sont pas seulement de précieux outils pour la mastication, au plan symbolique elles représentent également des « armes ». L’hygiène bucco-dentaire est par conséquent un rituel quotidien servant à entretenir ou, métaphoriquement, à « aiguiser » ces armes. La négligence de soins ou, le cas échéant, de réparations de celles-ci conduit inéluctablement à la destruction de l’arsenal de défense. Les armes « s’émoussent » progressivement, et dans le pire des cas, l’être humain se retrouve complètement « désarmé ». De même que lorsqu’il « ronge ses ongles », il détruit ses « griffes » par un acte d’automutilation dû à l’inaptitude de gérer les conflits.
Différents profils psychologiques existent. Si nous n’avions à soigner que des patients au système nerveux parfaitement équilibré et si nous étions nous-mêmes aussi dans ce cas, il y aurait peu de problèmes à résoudre. En fait la réalité n’est pas si simple. Et comme nous sommes tous, patients et praticiens, plus ou moins émotifs, il faut bien trouver un moyen de communication entre nous. Les émotifs peuvent présenter une gamme de réactions très diverses, s’ils sont sympathicotoniques ou vagotoniques ; les premiers réagiront brusquement, rapidement, mais la réaction sera de courte durée, tandis que les seconds ne pourront pas extérioriser leurs sensations qui n’en seront pas moins violentes intérieurement et d’autant plus durables. Dans cette série des émotifs, nous trouvons les inquiets, dont l’inquiétude peut aller jusqu’au malaise physique. Les craintifs sont des timides qu’un mal probable ou hypothétique rend très vulnérables. Et puis, les peureux, les pusillanimes qui reculent indéfi niment devant l’intervention la plus bénigne et qui sont en fuite perpétuelle devant la douleur réelle ou imaginée. En allant plus loin dans cette voie, nous trouvons les angoissés qui sont eux, à la limite entre le normal et le pathologique au point de vue mental. Leur réaction en face de l’acte opératoire peut aller jusqu’à la syncope ! Et puis il y a les malades mentaux, les obsédés, les phobiques, les hallucinés, etc. ; mais laissons de côté ces patients qui présentent des problèmes différents, à résoudre aussi par des méthodes inhabituelles. L’art dentaire ne consiste pas seulement à obturer des cavités Ce n’est pas faire preuve de psychologie que de dire à un patient qu’il n’a pas mal, s’il dit qu’il souffre. Même si la logique est pour vous, vous n’avez pas raison, car la douleur n’est pas un phénomène objectif, mais bien évidemment subjectif et variable selon les individus. De plus, la douleur peut être déclenchée ou perçue à tout autre endroit que celui où vous opérez ; d’ailleurs, le phénomène inverse existe aussi, car on peut obtenir la sédation d’une douleur par une compression, une cautérisation ou une piqûre (pas une injection) à un tout autre endroit que le siège de la douleur. L’angoisse provoquée par l’attente de la douleur est aussi pénible que n’importe quelle douleur objectivement contrôlable. Dire à un halluciné que ses visions sont inexistantes et ne pas s’en occuper, est le fait d’un mauvais psychologue ; car ses phantasmes, il les voit, il les sent, il peut même les toucher ; le raisonnement le mieux construit n’y changera rien. Je suis bien conscient que tout ce que je vous dis là peut paraître très abstrait, mais il faut avoir le courage de surmonter cette première impression et de faire un effort de recherche et vous verrez alors que tout ça n’est pas seulement du vent – ou d’aimables élucubrations de fantaisiste. Et vous verrez aussi que l’art dentaire ne consiste pas seulement à obturer des cavités ou à boucher des vides …
Psychologie dentaire II, Roger Joris, Genève
Rev Mens S.S. O, V o l 1 1 4 : 1 0 / 2 0 0 4 et Dr Ruediger Dahlke , Compte rendu du Congrès annuel de la SSO, du 22 au 24 mai 2003 à Lucerne –