Le point des recherches sur Alloderm

La communauté dentaire a depuis peu utilisé avec succès l’AlloDerm, notamment comme solution de rechange à une greffe donneuse palatine (greffe palatine libre) en vue d’augmenter les zones minimes de tissu kératinisé. Il a été utilisé comme solution de rechange à une greffe de tissu conjonctif sous-épithélial dans les procédures de recouvrement radiculaire.L’AlloDerm a également été utilisé dans la conservation des crêtes et dans des applications chirurgicales d’implants intraosseux

L’Alloderm® est une matrice acellulaire d’origine humaine commercialisée par LifeCell Corporation. Cette allogreffe, obtenue à partir de donneur contrôlé et connu, subi un traitement physique et chimique éliminant tout le contenu cellulaire (cellules épithéliales, conjonctives, virales et bactériennes). Le tissu conjonctif obtenu est uniquement composé de protéines matricielles extracellulaires (collagène, élastine et protéoglycanes essentiellement).

Ce procédé n’est disponible que depuis peu pour un usage médical et dentaire. Le tissu est prélevé par voie chirurgicale sur un donneur dans des conditions stériles de salle d’opération. L’allogreffe est traitée pour éliminer les couches épidermiques et toutes les cellules du derme. Le greffon résultant est une matrice dermique acellulaire dotée d’une structure et d’amas normaux de collagène et d’un complexe de membrane basale intact. Puisque le procédé d’AlloDerm® consiste à éliminer toutes les cellules, les éléments nécessaires à la survie et à la transmission des virus sont éliminés. En outre, de par l’élimination des cellules, il n’y a plus aucun élément susceptible de provoquer un rejet ou une inflammation, comme cela serait le cas avec des greffes de tissu non traitées. Par ailleurs, la greffe est lyophilisée. Aucun cas de transmission du VIH n’a jamais été observé à partir d’une greffe lyophilisée.

AlloDerm® a jusqu’à présent été utilisé avec succès dans de nombreuses circonstances différentes…

Wainwright, ainsi que Lattari et ses collègues ont fait état des bons résultats obtenus après l’avoir utilisé dans la gestion des brûlures de pleine épaisseur. AlloDerm® était considéré comme avantageux puisqu’il permettait de réduire la quantité nécessaire de peau donnée, de maximiser le derme disponible et de diminuer la morbidité au niveau des sites donneurs. Wainwright a également pu confirmer, à l’aide d’une évaluation histologique et au microscope électronique de biopsies, que les cellules hôtes s’infiltraient dans AlloDerm® conjointement à la néovascularisation de l’allogreffe.

Kridel et al. ont utilisé AlloDerm® aussi bien en cabinet privé que dans un environnement universitaire pour la réparation de perforations septales. Les résultats ont été jugés positifs dans tous les cas, avec une occlusion complète dans 11 des 12 cas.

Pour Harris et ses collaborateurs, à trois mois postopératoire, les sites traités par Alloderm® en comparaison avec des technique de greffe de conjonctif enfoui présentent un recouvrement radiculaire de 95.8% sans différence significative avec les sites contrôles chez 50 patients consécutifs (Harris RJ. A). A six mois post-opératoire les résultats sont également très satisfaisants avec un taux de recouvrement de 65.9 %8 et de 66.5% (Novaes AB Jr et coll.) On note en outre un gain du niveau d’attache clinique et une augmentation de la hauteur de tissu kératinisé significatifs par rapport aux valeurs préopératoires. Dans un autre essai clinique (Paolantonio M et coll.) randomisé chez 30 patients, les auteurs ne montrent pas de différence significative au niveau du recouvrement radiculaire entre Alloderm® et greffe de conjonctif enfoui.

Budunelli net al (J. clin. periodontol 2003) on montré que l’allographe de matrice dermique acellulaire peut donc être considéré comme une alternative dans le traitement des cas de bullose épidermolyse (développement de bulles ou de vésicules au niveau de la muqueuse ou de la peau comme réponse à un traumatisme mineur et entrainant nottament des récessions gingivale importante) afin d’augmenter la largeur de la gencive attachée et faciliter le maintien de la dentition. En outre ce processus chirurgical élimine la nécessité d’avoir un site donneur, apporte des résultats satisfaisants du point de vue esthétique et améliore le confort du patient.

L’Alloderm® a également été utilisé pour augmenter la quantité de tissu kératinisé chez des sujets adultes, autour d’implants dentaires. Cependant les études cliniques expérimentales comparant cette technique avec une greffe autogène libre conventionnelle (GAL) présentent des résultats contradictoires. Alors que Wei et coll montrent que la GAL apporte un gain de tissu kératinisé Harris n’observe aucune différence entre les deux techniques. Dans ces deux études, les auteurs mettent l’emphase sur l’aspect cicatriciel chéloïde obtenu avec Alloderm® et sur la contraction post-opératoire importante de ce matériau qui rend les résultats moins prévisibles.

Andrade, et al. – ont évalué l’utilisation de la matrice dermique acellullaire (ADM) comme membrane pour la régénération guidée de tissu (GTR) dans le traitement des lésions mandibulaires de furcation de la classe II et l’ont comparé à une membrane résorbable. Ils ont démointré qu’avec l’ADM ont obtenait des résultats histomorphometriques semblables à la membrane bioabsorbable mais qu’en plus on avait une augmentation importante de l’épaisseur de tissus kératinisé.

Fowler EB, Breault LG ont utilisé avec succès l’ allogreffe Alloderm pour l’augmentation de la crête dento-alvéolaire (anomalie de la crête de classe III). L’appariement de la teinte a été jugé excellent. En outre, il n’y a eu aucune perte postopératoire de hauteur des papilles. La technique innovatrice utilisée dans ce cas a été de replier la bande d’AlloDerm de sorte que le tissu conjonctif soit positionné face contre une source d’apport sanguin, l’os sous-jacent et le lambeau sus-jacent. L’orientation du greffon dermique acellulaire a été maintenue en place par trois sutures résorbables, le matériel a été placé à l’intérieur du « creux » créé par la chirurgie sur le lambeau, puis le lambeau sus-jacent a été suturé pour maintenir l’AlloDerm sous-jacent. La cicatrisation s’est déroulée sans problèmes et le patient a subi une restauration avec une pontique d’apparence plus naturelle.
Toujours sur l’augmentation des crêtes, l’étude de Batista réalisée de façon prospective sur un total de huit patients et dix huit défauts, montre une augmentation horizontale de 1.72 mm et une augmentation verticale de 0.61 (± 0.77) à 6 mois. La contraction tissulaire entre la fin de l’intervention et le commencement de la prothèse à 6 mois est de 41.4%. Le gain vertical semble faible et peu prédictible…

Lorsqu’AlloDerm® est utilisé pour les procédures d’augmentation de la zone de tissu kératinisé autour des dents et des implants, de recouvrement radiculaire et de conservation des crêtes, les rapports indiquent une cicatrisation normale et des résultats cliniques jugés positifs.
Cependant, les données des recherches actuelles restreignent l’utilisation d’Alloderm® aux recouvrements radiculaires. Bien que les premiers résultats soient prometteurs, la technique est délicate et nécessite une bonne connaissance des considérations cliniques spécifiques à ce matériau. La principale difficulté est qu’il faut être capable de garantir un recouvrement complet de la greffe avec un lambeau sans tension et une fermeture primaire. Les techniques d’incision, de dissection et de sutures doivent donc être parfaitement maîtrisées car contrairement à une greffe de conjonctif autogène, l’Alloderm® ne peut, dans le cas de recouvrement de racines, être laissé partiellement exposé…

Son utilisation devrait être limité aux rares cas où il n’est pas possible de prélever un greffon palatin. D’un point de vue histologique, le tissu cicatriciel produit contient beaucoup plus de fibres de collagènes et de fibres élastiques que la muqueuse normale. Il serait aussi incapable d’induire la cytodifférenciation épithéliale. De plus, il ne semble pas s’intégrer à la muqueuse du site receveur, et ne participe pas à la guérison. Il agirait essentiellement comme un pansement qui se déchire en morceaux et s’élimine dans la salive durant la cicatrisation. Selon Harris RJ. la greffe d’Alloderm® pour augmenter la hauteur de tissu kératinisé serait en fait comparable aux anciennes techniques de dénudation périostée.