Le lait : cariogène ou carioprotecteur ?

La carie est une maladie infectieuse favorisée par une alimentation riche en glucides. La prolifération du germe responsable, Streptococcus mutans, est directement liée à une consommation importante et fréquente de glucides qui, après une fermentation bactérienne, se transforment en acides, en particulier en acide lactique. Il en résulte une diminution du pH de la plaque dentaire responsable de la déminéralisation de l’émail. La carie apparaît au niveau des sites soumis à une forte exposition aux glucides, en particulier lorsque le flux salivaire est réduit. En effet, l’accroissement de la salivation assure un autonettoyage buccal, l’élimination des glucides et la neutralisation des acides. La salive contribue ainsi à la protection contre les caries dentaires, de même, la mastication favorise ce nettoyage en augmentant le flux salivaire.


Le lait et le processus carieux
Outre le flux salivaire, la nature des glucides est également importante dans la cariogenèse. Ainsi, le saccharose est 20 fois plus cariogène que le lactose absorbé sous forme de lait. D’autre part, le pH de la plaque, résultant de la fermentation du lactose, est rarement inférieur à 5,5, alors qu’il atteint une valeur de 4 avec le saccharose dont la fermentation est plus rapide et libère plus d’acides.

Ainsi, avec un taux de 4 % de lactose (7 % dans le lait maternel), le lait de vache n’est pas considéré comme un aliment cariogène. Si le lactose peut avoir un effet cariogène chez le nourrisson lorsqu’il consomme des biberons de lait en position allongée, c’est surtout parce que son temps de rétention dans la cavité buccale est augmenté et le flux salivaire, réduit. Le lait et les produits laitiers possèdent en fait des constituants carioprotecteurs qui méritent d’être mentionnés. Outre le rôle protecteur mieux connu du calcium et du phosphore, la caséine exerce une action anticariogène, ses glycomacropeptides et ses phosphopeptides limitant l’adhérence de Streptococcus mutans. Les graisses, pour leur part, forment une pellicule hydrophobe à la surface de l’émail, pouvant favoriser la clairance orale des aliments ; et les acides gras auraient un effet protecteur de nature antibactérienne.
Les bienfaits du fromage
Les fromages ont trois effets positifs au niveau buccal : une stimulation salivaire, une augmentation de la teneur en calcium de la plaque et de l’adsorption des protéines à la surface de l’émail. Ainsi, la présence concomitante du complexe phosphopeptidique de caséine et de phosphate de calcium permet une diminution de la déminéralisation et active la reminéralisation. Comme dans le cas du lait, les lipides des fromages, en particulier les acides gras, inhibent le développement de Streptococcus mutans. Enfin, le pH de la plaque après mastication d’un fromage reste supérieur au pH à risque de 5,7. De plus, la mastication de fromage juste après la consommation de produits sucrés, en empêchant le pH de descendre en dessous du seuil à risque, pourrait protéger des caries.
En conclusion, outre les conseils d’hygiène dentaire essentiels dans le maintien de la santé buccodentaire, la consommation de lait et de produits laitiers est à conseiller lors des programmes de prévention chez les sujets à risque de caries dentaires.
Le lactose, en tant que glucide, est susceptible de favoriser dans certaines conditions la formation de carie. Cependant, le lait et les produits laitiers considérés en tant qu’aliments ont un rôle protecteur vis-à-vis du processus carieux
et certains de leurs constituants sont même carioprotecteurs

SOURCE : Lettre d’information du « Centre de recherche et d’information nutritionelle » (Juin 2001) « Lait, nutrition et santé »
Cet ouvrage collectif, réalisé sous la coordination du Pr Gérard Debry, définit les caractéristiques physico-chimiques, la biodisponibilité et les valeurs nutritionnelles du lait et de ses constituants. Plus de 200 pages sont consacrées à ses effets sur la santé (intolérance, allergie, santé osseuse, cancer…). Les questions d’hygiène et de sécurité de la filière industrielle, et l’influence des traitements technologiques sur les propriétés nutritionnelles du lait sont également traitées. L’ouvrage se termine par une analyse de la consommation de lait en France et les incontournables recommandations et conseils pratiques.
Editions TEC & DOC, 2001
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