En France les cancers des voies aéro-digestives supérieures (bouche, nez, pharynx, larynx, oesophage) représentent 8% des cancers (autant que les cancers broncho-pulmonaires) et se placent au quatrième rang, par ordre de fréquence, de l’ensemble des cancers.
Parmi eux, 96% sont des carcinomes, c’est-à-dire des tumeurs malignes nées à partir des couches cellulaires qui composent la partie superficielle des muqueuses de recouvrement.
La France détient le triste record de la première place en Europe et de la seconde place dans le monde, à la fois en fréquence et en taux de mortalité, pour ces cancers. “C’est donc un véritable problème de santé publique”, souligne le Dr Didier Gauzeran. D’autant plus que ces cancers entraînent des métastases facilement et rapidement et ont un très mauvais pronostic (50% de décès à 3 ans).
Un des facteurs qui explique ce mauvais pronostic est le retard apporté au diagnostic. La majorité des cancers sont en effet diagnostiqués à des stades trop avancés.
L’ignorance de la grande majorité de la population, la discrétion des signes fonctionnels, la négligence du patient, la timidité de certains praticiens qui ne pratiquent pas un dépistage systématique de la bouche et de la région cervico-maxillo-faciale chez les sujets à risque (tabac, alcool, personnes âgées, familles à cancers) entraînent une perte de temps et donc une perte de chance thérapeutique pour le malade, affirme le Dr Gauzeran.La bouche est un organe très facilement accessible et ces cancers sont des lésions de surface donc très aisément visibles par les praticiens mais aussi par les patients dans la plupart des cas.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) et d’autres instances internationales considèrent d’ailleurs qu’il est de la responsabilité du chirurgien-dentiste de dépister les lésions à risque, les lésions précancéreuses et cancéreuses.
Une lésion qui persiste, en particulier une ulcération indolore et saignant souvent doit faire suspecter une lésion cancéreuse.
Il existe aussi un grand nombre de lésions bénignes qui, sous certaines formes cliniques, bien particulières selon le terrain qui les abrite, peuvent subir une transformation maligne dans 1 à 20 % des cas selon les pathologies : par exemple les kératoses réactionnelles au tabac (lésions blanchâtres, plus ou moins en relief et qui ne se détachent pas de la muqueuse), le lichen plan, certaines mycoses candidosiques chroniques, les traumatismes chroniques. Ces lésions sont suspectes lorsqu’elles ont un aspect érosif (ulcération très superficielle) et ou kératosiques, donnant un aspect rouge parsemé de petits îlots blanchâtres de kératose.
Le chirurgien-dentiste doit s’impliquer dans le dépistage des maladies de muqueuses buccales en général. Dans tous les cas, il est aux avant-postes pour le dépistage des lésions à risque, des lésions précancéreuses et des cancers de la cavité buccale, surtout chez les patients à risque, lors de la toute première visite.
De son côté, le praticien attend du patient qu’il consulte dès qu’il présente un problème buccal, qu'”il prenne conscience du fléau que représente le tabac et son association avec l’alcool, qu’il entende les consignes et conseils du corps médical”, souligne l’expert./yg
Mercredi 24 novembre 2004 – Copyright © APM-Santé – Tous droits réservés