La greffe d’apposition pré-implantaire pour édentation maxillaire antérieure

La greffe osseuse d’apposition est une des méthodes de choix pour la reconstruction des atrophies antérieures du maxillaire. Le taux de réussite des greffes d’apposition varie dans la littérature entre 80 et 100 % . L’objectif de ce travail était d’évaluer le pourcentage de réussite de la greffe d’apposition, le degré de résorption osseuse, et l’ostéo-intégration des implants sur la greffe.

L’édentation de la région antérieure du maxillaire (pré-maxillaire) entraîne une résorption alvéolaire verticale et transversale qui prédomine sur le versant vestibulaire (résorption centripète). La réhabilitation prothétique de cette région est fonctionnelle, mais surtout esthétique. Le résultat esthétique est correct si l’anatomie de la crête alvéolaire optimise le placement des implants. Plus le diamètre de l’implant est grand, plus la portion cervicale de la couronne qu’il supporte est esthétique. Une hauteur de crête alvéolaire de 8 à 10 mm et une largeur minimale de 5 à 6 mm , sont nécessaires pour assurer une stabilité primaire des implants. La greffe osseuse d’apposition est une des méthodes de choix pour la reconstruction du pré-maxillaire.

Une étude rétrospective a été mené sur 36 cas de greffe osseuse d’apposition du pré-maxillaire, opérés entre 1998 et 2002. Tous les greffons étaient autologues. Le site donneur était pariétal dans 24 cas, intra-oral dans 8 cas, et iliaque dans 4 cas.

L’os autologue est le matériau privilégié en raison de son meilleur pouvoir ostéogénique . Les prélèvements crâniens et surtout intra-oraux, procurent de l’os membraneux dont la revascularisation est plus rapide et la résorption plus faible que l’os enchondral. La morbidité sur le site donneur est d’autre part assez réduite. Le prélèvement iliaque, est de moins en moins utilisé, car l’os est de moins bonne qualité, avec une forte tendance à la résorption.

Quatre-vingts implants ont été posés sur les 34 sites greffés, avec une moyenne de 2,4 implants par greffe.
Deux échecs de la greffe ont été relevés. Le pourcentage de réussite de la greffe a été de 94,5 %. Une résorption partielle sans répercussion sur l’insertion des implants a été notée dans 3 cas. Quatre-vingts implants ont été insérés sur les 34 sites greffés avec succès, avec en moyenne 2,4 implants par greffe. Trois implants ont été déposés, la survie implantaire a été de 96,2 %.
Cette étude montre que les greffes osseuses d’apposition apportent un volume osseux suffisant pour l’insertion d’implants, dans 94,5 % des cas. La résorption osseuse partielle (inférieure à 25 % du volume total), observée dans 3 cas, n’a pas eu de répercussion sur la mise en place des implants. La survie implantaire globale sur les sites greffés a été de 96,2 %.

Windmark a constaté une résorption partielle moyenne de 25 % du volume total du greffon, à 4 mois. Balaji n’a pas mis en évidence de résorption initiale, mais il l’évalue à 14 % en moyenne entre l’insertion des implants et la mise en place de la prothèse définitive. Nystrom a démontré que la majorité de la résorption osseuse survient dans les 6 premiers mois, et qu’elle est minime après 12 mois. Cette résorption est variable entre les patients, et plusieurs facteurs individuels ont été évoqués (age, race, sexe, statut hormonal, intoxication tabagique…).

Certains détails techniques doivent être respectés pour assurer la réussite de la greffe. Il convient de préserver les papilles des dents adjacentes au site greffé car leur reconstruction est très difficile .
-Il faut éradiquer, au niveau du site receveur, tous les foyers d’inflammation ou de fibrose ; ils risquent d’engendrer une cicatrisation fibreuse et donc une instabilité de la greffe. -Il faut éliminer les espaces morts entre la greffe et le site receveur, et bien immobiliser le greffon .
-Il faut surcorriger la crête alvéolaire en prévision de l’éventuelle résorption. La mise en tension des sutures muqueuses doit être proscrite. Mais les lambeaux muqueux imposent souvent des retouches secondaires .
-Il faut enfin lutter contre l’infection par une asepsie rigoureuse et une antibio-prévention. L’infection est la principale cause d’échec total ou partiel de la greffe.Les implants peuvent être insérés dans le même temps opératoire ou plus souvent dans un deuxième temps 4 à 6 mois après la greffe. Tulasne préfère la tactique en 2 temps : « construire d’abord, implanter ensuite », surtout dans les édentations complètes associant une résorption verticale et transversale, car elle permet de ne placer les implants qu’à coup sûr (l’échec de la greffe est possible). Dans les formes unitaires (volume faible) et transversales (segmentaires ou complètes) c’est la seule méthode possible. La tactique en 1 seul temps est réservée aux formes segmentaires à résorption verticales, où la présence des dents de voisinage permet le positionnement idéal des implants. Les complications sont plus fréquentes dans ce cas (fracture du greffon, exposition, perte des implants). Triplett a constaté que la stabilité implantaire était meilleure pour la technique en 2 temps (90,4 % contre 83,6 %).

La greffe d’apposition est une des techniques de reconstruction des atrophies maxillaires antérieures, permettant un placement optimal et une bonne ostéo-intégration des implants.

La prévention des pertes de substance alvéolaires reste la meilleure solution. Les techniques de régénération osseuse guidée (ROG) sont des alternatives qui sont en cours de développement pour permettre de maintenir l’option implantaire.
Pour améliorer la prise et la stabilité de la greffe, certains auteurs utilisent d’autres moyens comme les biomatériaux, le plasma riche en plaquettes (PRP), et les membranes résorbables. Les résultats à courts termes sont encourageants, mais une évaluation à long terme reste indispensable.

Mais cette étude montre bien que la technique de la greffe osseuse d’apposition du pré-maxillaire, par greffon autologue, apporte un volume osseux suffisant pour assurer l’insertion optimale et la stabilité des implants.

Source : “la greffe d’apposition à visée pré-implantaire pour édentation maxillaire antérieure” Étude rétrospective de 36 cas

M.-N. Baccar[1], B. Laure[1], F. Sury[1], G. Romieux[1], B. Bonin[1], D. Goga[1]
[1] Service de Chirurgie Maxillo-Faciale, CHU Trousseau, 37044 Tours Cedex.