Dans sa revue mensuelle destinée à ses 15.000 adhérents, la confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) les a appelés à inscrire les bénéficiaires de la CMU-C (couverture maladie universelle complémentaire) sur des listes d’attente pour les soins prothétiques et orthodontiques.
Cet appel a été vivement condamné par le ministre de la santé, Philippe Douste-Blazy, et le secrétaire d’Etat à l’assurance maladie, Xavier Bertrand, qui l’ont qualifié d’inacceptable”, demandant au président de la CNSD, Jean-Claude Michel, de “suspendre ce mot d’ordre”.
Ce dernier, qui n’avait pas caché son intention de vouloir “jeter un pavé dans la mare”, a finalement “suspendu” cette initiative en milieu d’après-midi, après avoir obtenu un rendez-vous avec le directeur de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam), Frédéric van Roekeghem.
La confédération entendait obtenir l’ouverture de “négociations” sur les revenus des dentistes, justifiant son mot d’ordre par le fait que les cabinets installés dans les zones à forte densité de bénéficiaires de la CMU n’étaient pas viables et périclitent, à l’inverse de ceux opérant dans des zones favorisées, de sorte que se développe ainsi “une chirurgie dentaire à deux vitesses”.
“Il s’agit d’une concertation et non l’ouverture d’une négociation”, a précisé à l’AFP M. van Roekeghem, se défendant de “réagir sous la pression”.
Le directeur de l’Uncam, qui avait déploré que la CNSD “prenne en otage les assurés”, a fait valoir qu’il n’ouvrirait “pas de négociations” sur le sujet tant que le conseil de l’Uncam ne l’aura pas fixé comme “orientation”.
Quoi qu’il en soit, la CNSD prévoyait d’aller encore plus loin dans son action.
Philippe Douste-Blazy, le 17 janvier 2005 à Paris
© AFP/Archives Jack Guez
Dans sa revue, elle demandait aux praticiens, “dans un deuxième temps”, de “ne prendre en charge” les quelque 4,8 millions (chiffre 2003) de bénéficiaires de la CMU complémentaire “que pour les soins d’urgence”.
Pis, “en l’absence de réponse des pouvoirs publics et des caisses d’assurance maladie, nous serons contraints de refuser tout soin dans le cadre de la CMU-complémentaire”, avait-elle préconisé.
De fait, une discrimination dans l’accès aux soins existe déjà, avait souligné en 2003 Médecins du monde dans son rapport de l’Observatoire de l’accès aux soins. L’association, qui avait mené alors une enquête téléphonique auprès de 230 dentistes libéraux dans 11 villes, avait montré que 35,3% des dentistes avaient opposé des refus “méprisants” ou “déguisés” à des demandes de soins émanant de bénéficiaires de la CMU (35,3%).
Les personnes en CMU complémentaire bénéficient, depuis l’entrée en vigueur il y a cinq ans de la loi, d’une absence d’avance de frais chez les dentistes.
En outre, ces derniers, dans le cas de soins prothétiques ou d’orthodontie à ces personnes, sont tenus de pratiquer des forfaits selon un montant fixé par l’assurance maladie, excluant tout dépassement comme ils en ont la faculté avec des patients aux revenus plus importants.
Ces dépassements sont estimés à “plus d’un tiers” des prix fixés pour les patients en CMU complémentaire: “un dentiste doit facturer ainsi environ 381 € un appareil régime neuf dents, alors qu’il le fait payer environ 520 € à un autre patient”, selon M. Michel.