On estime que dix pour-cent de la population adulte (d’après cette étude en Suède) sont impliqués dans une forme quelconque de consommation de drogue. De nombreux problèmes sont liés à la consommation de drogues – la plupart du temps, le corps de l’individu souffre d’une exposition importante et excessivement prolongée.
Lorsque l’on évoque le problème de l’intoxication, la plupart des gens pensent exclusivement à la drogue, mais la substance utilisée le plus couramment en Suède , c’est l’alcool. On estime qu’entre 15 et 20% de la population en Suède boivent beaucoup trop et qu’entre 6 et 10% sont des alcooliques.
“L’intoxiqué ‘classique’, c’est-à-dire une personne intoxiquée à l’alcool ou à la drogue, se fait de plus en plus rare. L’intoxiqué moderne combine normalement l’alcool avec des analgésiques et des tranquillisants,” dit Mikael Zimmerman, dentiste et sous-directeur médical à la clinique de chirurgie buccale à l’institut de Karolinsk.
Ceux qu’il est coutume d’appeler les “junkies” jonchant les bancs et les trottoirs des villes ne constituent qu’un faible pourcentage de toutes les personnes intoxiquées à l’alcool ou une autre drogue quelconque. Environ 95 % des personnes intoxiquées ne se voient jamais. Ils mènent une vie sociale relativement normale et d’ordinaire seul leur entourage familial immédiat soupçonne le problème. Ce sont également les gens qui souffrent le plus, en même temps que les intoxiqués eux-mêmes, bien sûr.
Une grande partie des dommages infligés aux dents sont directement liés à la drogue
Les alcooliques et les drogués ont davantage de risques de développer des caries. Certains dommages infligés aux dents sont liés directement à la drogue ou à l’alcool,” déclare Mikael Zimmerman, “et le dentiste n’aura aucun mal à s’en apercevoir lors d’un examen de routine.”
“Une consommation abusive d’alcool assèche la bouche, ce qui augmente le risque de caries. Certains spiritueux contiennent des quantités importantes de sucre, ce qui n’est jamais bon pour les dents et les spiritueux à un degré élevé d’alcool ont un effet décapant sur les dents et la membrane muqueuse dans la bouche. Les caries dans la bouche d’un alcool ont un aspect différent – elles sont normalement plus nombreuses et font penser à du bois ou une éponge,” explique Mikael Zimmerman.
Un alcoolique souffre normalement de vomissements acides. Ce vomissement ramène l’acide chlorhydrique de l’estomac vers la bouche, ce qui provoque l’érosion acide des dents.
“La partie intérieure des dents de devant est une zone particulièrement exposée à l’érosion. C’est problème courant chez les anorexiques et les boulimiques, parce qu’eux aussi vomissent souvent,” déclare Mikael Zimmerman.
Le vomissement et les dommages infligés aux dents sont un problème courant chez les héroïnomanes et les gens utilisant d’autres drogues dures. De nombreux consommateurs d’amphétamine souffrent également d’occlusion violente involontaire et le grincement des dents (en particulier lorsqu’ils essaient de s’en sortir) ce qui provoque de graves dommages.
“Certains alcooliques grincent des dents, surtout pendant leur sommeil et lorsque l’effet de la drogue s’atténue. Mais il existe de nombreux autres facteurs conduisant les gens à grincer des dents la nuit et l’utilisation d’alcool est loin de constituer la seule raison,” déclare Mikael Zimmerman.
Un foi endommagé inhibe la production de la vitamine K
Les consommateurs de Marijuana souffrent d’une salivation réduite et d’une bouche sèche comme les alcooliques, dans une large mesure. Les utilisateurs de longue durée souffrent d’un métabolisme affaibli, de mauvaises habitudes alimentaires et de problèmes de fonctionnement du foi. Les personnes utilisatrices de drogues dures souffrent souvent de déficiences de vitamine et une baisse des défenses immunitaires les rend plus vulnérables aux infections.
“Toutes les drogues ont un effet adverse sur le foi. Si le foi ne fonctionne pas normalement, la production de la vitamine K est affectée et cela perturbera la coagulation. De nombreux intoxiqués souffrent d’une déficience de la vitamine K et saignent facilement, ce qui causent des problèmes lorsqu’ils se rendent chez le dentiste pour de graves opérations,” déclare Mikael Zimmerman.
Des études ont également démontré que l’abus d’alcool combiné à l’absorption réduite de vitamines augmentait le risque de gingivites, avec probablement une périodontite à long terme.
Des drogués de plus en plus jeunes
Les drogués sont de plus en plus jeunes. Le nombre de jeunes drogués est plus élevé à l’heure actuelle qu’il y a dix ans et en conséquence, davantage de jeunes deviennent des consommateurs habituels. En plus de l’alcool et de la marijuana, les jeunes gens utilisent de l’ecstasy et du LSD.
“L’âge moyen des jeunes gens utilisant des substances narcotiques pour la première fois en Suède aujourd’hui est de 11 ans pour les garçons et 13 ans pour les filles. Ces chiffres sont effrayants, parce que dès la sixième et la cinquième ces jeunes gens courent le risque de devenir dépendants,” déclare Mikael Zimmerman.
“Les jeunes drogués sont facilement repérés par un dentiste,” dit Mikael Zimmerman. “Ils sont normalement agressifs et présentent un grand nombre de caries et cela est une indication suffisante que quelque chose va mal.”
“Les services dentaires disposent d’un potentiel fantastique pour détecter les drogués dès les premiers stades. Les dentistes suédois voient passer chez eux environ 95% de toute la jeunesse et 75% des adultes régulièrement. A l’heure actuelle, il est rare que les dentistes réagissent s’ils soupçonnent qu’un patient consomme de la drogue. Mais je pense que la situation va s’améliorer – aujourd’hui par exemple, les dentistes suivent une formation systématique aux effets de la drogue sur les dents et ils sont sensibilisés aux problèmes qui en découlent, en particulier les jeunes dentistes.”
Réactions positives des patients
Mikael Zimmerman aborde les patients de front lorsqu’il les soupçonne de prendre de la drogue.
“Les réactions sont généralement positives lorsque je prends le problème à bras le corps et de nombreux patients qui refusent de s’avouer comme tels, sont extrêmement reconnaissants lorsqu’une personne a réagi. Je suis très direct et j’aborde le problème en termes formels. Personne ne veut réellement avouer qu’il est alcoolique et beaucoup donneraient très cher pour s’en sortir”
La première chose que fait Mikael Zimmerman est de suggérer que le patient prenne contact avec un médecin ou l’unité de désintoxication de l’hôpital.
“La municipalité locale et les travailleurs sociaux peuvent apporter leur contribution en matière de réinsertion dans la société. Ils font un travail formidable et les Alcooliques Anonymes constituent une solution excellente pour ceux qui décident d’arrêter de boire.”
“Pour les personnes ayant réussi leur sevrage, une chance énorme s’offre à eux pour résoudre leurs problèmes dentaires. Ce sont fréquemment les dents et la bouche qui deviennent une priorité lorsque les anciens malades décident de remettre de l’ordre dans leur vie.”
Ola Blomqvist
ola@medicallink.se
Source: TandhygienistTidningen Vol. 19 No. 2 1999
