De nouveaux tests salivaires pour un bilan de santé global

Washington – Le Figaro [22 février 2005] : Les fluides de la bouche pourraient remplacer le sang et l’urine pour détecter des affections.
La 171e réunion de l’Association américaine pour l’avancement de la science (AAAS), grand-messe annuelle rassemblant des centaines de chercheurs de toutes les dis ciplines, s’est achevée hier à Washington. Plusieurs équipes ont présenté les perspectives pour la santé ouvertes par de nouveaux tests rapides qui permettraient de détecter la consommation de drogue, les caries avant leur formation, voire certains cancers à partir d’une simple goutte de salive.

Si on dit que les yeux sont le miroir de l’âme, la bouche, elle, est le reflet du corps. La salive et les substances qu’elle recèle semble même émerger comme un nouveau moyen de détection de nombreuses af fections. «Presque tout ce qui est présent dans votre corps se manifeste d’une façon ou d’une autre à travers les fluides de votre bouche, qu’il s’agisse de la salive, des muqueuses ou de la plaque dentaire», affirme Daniel Ma lamud, de l’université de Pen nsylvanie. La recherche a en effet montré que ces fluides bucaux contiennent des ions, des bactéries, des virus, des hormones, des anticorps ou encore de l’ADN. Bien que de rapides tests sur la salive soient déjà pratiqués par la police, pour détecter la consommation d’alcool ou de drogue, la réalisation d’autres tests plus sophistiqués, comme ceux cherchant à déceler par exemple la présence d’anthrax (bacille du charbon), nécessiteraient un laboratoire entier.

Aussi une équipe de chercheurs américains menée par Daniel Malamud s’efforce de mettre au point un dispositif simplifié prenant la forme d’un kit, guère plus grand qu’une carte de crédit, et permettant de donner des résultats en moins d’une heure.

Plus pratique qu’un prélèvement urinaire ou sanguin, parfois même plus complet, ce nouveau type de prélèvement n’est pas dénué d’avantages. Car «il est aujourd’hui généralement aussi précis que les tests urinaires destinés à détecter la consommation de drogue, d’autant que ces derniers sont parfois biaisés par les consommateurs, qui savent les contourner avec des produits de substitution», souligne Edward J. Cone, de ConeChem Research.

Les applications d’une telle méthode sont multiples. Loin d’être cantonnés à la détection de drogue, les prélèvements de salive peuvent par ailleurs être d’un grand secours en médecine. Ils sont par exemple à même de donner des indications sur la probabilité qu’un enfant développe à l’avenir des caries, en précisant combien celui-ci risque d’en développer et quelles sont les dents les plus vulnérables. C’est ce que montrent les travaux de Paul Denny, de l’université de Californie du Sud, qui souligne ses implications en terme de prévention. La salive pourrait même servir de marqueur pour diagnostiquer le cancer de la bouche, comme le montrent les travaux de David Wong, de l’université de Californie à Los Angeles. Enfin, cette méthode est de nature à détecter le virus HIV et le Bacillus cereus, une bactérie assez proche du bacille du charbon, responsable de l’anthrax.

Comme le souligne Daniel Malamud, «cela peut être particulièrement utile dans l’hypothèse d’un incident bioterroriste ou de façon plus générale aux urgences, pour savoir s’il faut administrer ou non des antibiotiques».

D’ici à deux ans, estime David Wong, son équipe disposera d’un inventaire des protéines normalement contenues dans la salive, ouvrant la voie à une multiplication des tests salivaires.