Biphosphonates : facteurs de risques et conduite à tenir

Pour le chirurgien-dentiste ou le médecin stomatologiste, il importe désormais important de savoir évaluer les risques induits par les biphosphonates (ostéonécrose de la mâchoire) en fonction de l’état de santé général et bucco-dentaire du patient.

Dans tous les cas de figures, le chirurgien-dentiste est invité à questionner son patient (dans le cadre de son questionnaire médical systématique) afin de préciser sa pathologie pour laquelle ce traitement est suivis (dans le traitement de l’ostéoporose, de la maladie osseuse de Paget et dans les pathologies tumorales osseuses.) et le type de molécule prescrite (Spécialité commerciale voie d’administration orale ou IV)

Il s’agit ensuite d’évaluer les risques en pratique bucco dentaire en fonction de la pathologie et

Un groupe d’experts de l’AFSSAPS a classé les risques en 3 catégories

-patient candidats à un traitement par BP
-patient traité par BP sans évidence d’ONM
-patient atteint d’une ostéonécrose avérée.

1. PATIENTS CANDIDATS À UN TRAITEMENT PAR BP
a) Chez les patients devant recevoir un BP dans le cadre de pathologies malignes, la conduite à tenir sera de réaliser :
– un bilan bucco-dentaire
– un bilan radiologique (panoramique dentaire complété par des clichés rétroalvéolaires voire un dental scanner en cas de doute sur un foyer infectieux).
– un assainissement de la cavité Buccale

b) Chez les patients devant recevoir un BP dans le cadre d’une ostéoporose ou la maladie de Paget : -réaliser un bilan bucco-dentaire
-faire les soins nécessaires.
remarque : ces soins ne doivent pas retarder l’instauration du traitement par BP chez les patients à risque élevé de fractures…

2. PATIENTS TRAITÉS PAR BP SANS ÉVIDENCE D’ONM
a) Chez les patients recevant un BP dans le cadre de pathologies malignes, il est indispensable :
– de réaliser un suivi bucco-dentaire tous les 4 mois et bien évidemment au moindre symptôme bucco-dentaire, en collaboration avec l’oncologue.
– dépister et traiter les foyers infectieux par des gestes aussi peu agressifs que possible pour l’os, le parodonte et la muqueuse.

Les extractions seront limitées aux dents non conservables
-sans vaso constricteurs
-sans arrêter le traitement par BP, sous anesthésie locale ou locorégionale,
– sous traitement ATB de couverture à débuter la veille puis jusqu’à cicatrisation complète avec régularisation de crête et suture complète des berges

On évitera les extractions dans les cas suivants
– dents dont la mobilité est de stade 1 à 2 : envisager plutôt la confection d’une attelle de contention pour stabiliser les , plutôt qu’une extraction.
– dent fortement délabrée par une lésion carieuse mais sans mobilité pathologique : réaliser un traitement endodontique en coupant la couronne au ras de la gencive et en reconstituant la dent avec les techniques conventionnelles en prenant soin de ne pas altérer les tissus envi ronnants.
– de contre-indiquer les traitements parodontaux chirurgicaux
– de contre-indiquer l’implantologie.

b) Chez les patients recevant un BP dans le cadre d’un ostéoporose I maladie de Paget, il est recommandé:
– de réaliser un suivi bucco-dentaire au moindre symp tome et comme recommandé dans la population gêné raie au minimum une fois par an
– d’effectuer les avulsions dentaires nécessaires, sou traitement antibiotique et de la façon la moins traumatisante possible

3. PATIENTS ATTEINTS D’UNE OSTÉONÉCROSE AVÉRÉE

a) Le patient doit être impérativement adressé à un service hospitalier.

Dans l’attente de la prise en charge hospitalière, il est recommandé de :
– réaliser un bilan radiologique
(panoramique dentaire) afin d’apprécier l’importance
de la nécrose et la présence éventuelle d’un séquestre,
– éviter tout geste chirurgical,
– traiter médicalement la douleur,
– poursuivre une hygiène bucco-dentaire stricte.

b. des bains de bouche quotidiens à l’aide d’une solution antiseptique (chlorhexidine aqueuse 0,1%) sont recommandés en présence d’ulcérations avec zone d’os nécrotique visible en bouche.

c. il est bien évidemment nécessaire d’informer le méde¬cin prescripteur de la complication du traitement par BP. La poursuite de ce traitement sera décidée au cas par cas par ce médecin.
L’Afssaps rappelle que tout effet indésirable grave ou inattendu doit être signalé au centre régional de pharmacovigilance dont vous dépendez (voir www.afssaps.sante.fr ).

4. BP et IMPLANTOLOGIE

Les implants seront contre-indiqués si le patient est traité par BP dans le cadre de pathologies malignes.
Cependant la présence d’implants déjà intégrés dans la structure osseuse n’augmente pas le risque d’ONM, ils doivent donc être conservés.
“Dans le domaine implantaire, la présence d’implants asymptomatiques ne justifie pas, au vu des données cliniques actuelles et de la littérature, leur retrait, tant chez les patients sous Biphosphonates oraux que sous Biphosphonates parentéraux. Il importe de rechercher, lors de l’interrogatoire, au cours du bilan préimplantaire, la prise de ce type de molécules et d’informer, sans caractère alarmiste, le patient dans le cadre d’un consentement éclairé.
En cas de traitement en cours par Biphosphonates parentéraux, à titre préventif, il est conseillé de surseoir à la pose d’implants ou tout acte chirurgical non indispensable. D’autres bilans et analyses seront nécessaires pour formuler, dans l’avenir, un consensus thérapeutique.” (B Guillaume et D Chappard) (CDF 21 28 février 2008)
Les données actuelles ne contre-indiquent pas l’implantologie chez les patients traités par BP dans le cadre d’une ostéoporose.

5. SUIVI DU PATIENT
Il importe de s’assurer que le patient a été correctement informé du risque d’ONM, de la nécessité de maintenir une bonne hygiène et un suivi bucco dentaire en signalant au praticien toute mobilité dentaire, gonflement, inflammation.
Le praticien doit également de son côté signaler tout effet indésirable grave ou inattendu du aux BP au centre régional de pharmacovigilance.

Source et références :
-Lettre de l’AFSSAPS : http://afssaps.sante.fr/htm/lo/filltrpsc/lp07l203.pdf
-CDF 24 31 janvier 2008 Vigilance dentaire selon l’AFFSAPS
-CDF 21 28 février 2008 (B Guillaume et D Chappard – Ostéonécrose de la mâchoire et chirurgie implantaire)